20090117

Mélodramatisme Flamboyant

A toi,

Palpitation dans les veines de la grande ville. Ici ça cogne, ici ça crie. Le cœur bat, à contretemps. A l'échelle humaine, la ville : c'est moi. Mon cœur bat, à contretemps du tien. Mon cœur bat, et c'est bien la seule chose qui tourne rond chez moi, avec mon ennui, peut-être aussi, un peu. Larme d'encre posée en épitaphe, je commence la description de ma déprime allant bon vent et vouée à aucun avenir.
Ici, il fait tous le temps soleil, alors on ne peut pas se plaindre haut et fort. Le soleil interdit le spleen dans le cœur des gens ; et l'on me fuit ainsi, moi le bonnet de nuit. Je me fais pousser la barbe. Tous les trois jours je la rase. Indécis, ainsi, j'attends le déluge, du moins la bruine. Il fait froid malgré tout – froid, parce que tu n'es plus là, parce que c'est la couleur de tes regards ; parce que le mistral souffle et me pousse dans l'abysse de ton sourire. Tu as des yeux noirs, et je m'y noie ; tu m'entoures de tes souvenirs. Senteurs sucrées. Tu es partie, mais ton spectre plane, fragrance muette pour narine habituées. Tu es devenue une douce routine dont on se rappelle avec la larme à l'œil.
Un mug de thé à la main, je vois la rue, et elle est belle. Encrassée de voiture. Mes poumons souffrent depuis que tu n'es plus là. Passivité outrancière. J'erre dans l'appart que tu as laissé derrière toi. J'erre dans ce trois-pièces haussmannien où tout semble étrange dorénavant. Les ombres se font chinoises, et à travers les formes qui se découpent, je m'invente des histoires, pour dormir debout ; Je mets de la musique – fort, pour embêter les voisins comme tu le faisais – et le soir, j'entends le couple du dessus faire l'amour toute la nuit ou presque. Il faudrait qu'ils pensent à changer de lit. Oui. Il y a des fissures au plafond, au dessus du lit. Je ne m'en étais jamais rendu compte avant.
Demain, j'irais me balader à l'aube. Et j'aurais le nez rouge, comme un clown triste, le teint de cire : de la buée sortira de ma bouche. Mon cuir ne retiendra pas la chaleur de mon corps, n'empêchera pas le froid d'entrer. Et en contemplant le ciel dégagé, je ferais la danse de la pluie. En ton souvenir, pour que mon cœur ne s'arrête pas de battre. Pour que la lassitude ne l'étreint pas lui aussi.
Je ne sais pas si tu te rends compte de la place que prend un être humain dans un appartement. Je vis dans une boîte vide, et ce n'est pas les meubles qui manquent pourtant. J'ai commencé à tout démonter, j'ai fait des cartons. Comme si je déménageais. A vrai dire, je m'en vais, ça y est. Je ne sais pas vers où.
Cela fait depuis que tu es partie que je réfléchis à toute cette histoire. Oui, un mois d'intense réflexion. Entrecoupé de coups de gueules au boulot, de repas express au micro onde, de plateau télé boiteux, d'émissions fadent, de mauvais films et de cinéma en solitaire. Réflexion intense qui parfois me faisait échouer dans un quelconque pub à des heures tardives., après de longues baladent en solitaire que nous arpentions avant main dans la main. Parfois, je ris, et d'autres, je te trompe. Si c'est réellement te tromper que faire l'amour à l'anonymat. Celui-ci me le rend bien, et c'est ainsi que fonctionne le monde. Tu le disais toi-même « nous sommes inconsistants, même si l'on est solide », alors, pourquoi se donner des prénoms. On se voit, on se reconnaît. Les animaux, eux, ont compris ça avant nous.
Le parquet craque. La fille sans nom d'hier m'a demandé si j'allais déménager, parce que c'est une belle piaule que j'avais là. Elle s'est retrouvée à la porte, elle ne sait toujours pas pourquoi. Dis moi, pourquoi se presse-t-on à construire le verbe aimer ? Faire l'amour. C'est horrible comme expression. Comme si c'était constructible. L'amour est un château de carte dirons certains. C'est extrêmement mièvre n'est ce pas ? Tu te souviens, parfois on rigolait de ces phrases.
Quand je regarde tout ça, je me dis que c'est normal qu'on en arrive à cette situation. On s'est cru trop fort. Peut-être l'étions nous, peut-être que l'on pensait jouer un tour à l'amour, mais c'est impossible. L'amour est omniscient, et moi aussi, je le suis dans mon petit monde. Dans mon trois pièce où rien ne bouge, où tout est figé, où la crasse est de la lassitude, et où la poussière fait des moutons sur le sol. Le royaume des ombres s'étend devant moi, et je suis souverain du vide, du rien.
J'ai retrouvé des objets à toi. Un rimmel, un crayon noir. « Les yeux noirs », Django Reinhardt. Oui, c'était sur ça que l'on vivait, ce contretemps.
Il y a des fissures partout et la lumière est terne. Je décline tous les mots de la famille d'égoïste. J'occupe mon temps ; celui que tu m'as pris. J'écris, mais je pleure aussi. Et je vomis sur l'asphalte toutes les émotions que je n'ai pas pu te donner, tous les sentiments que je n'ai pas pu t'expliquer.

Se faire plaquer, c'est mourir, à petit feu, du regret.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

& le plus dure reste à avancer.

Anonyme a dit…

Je ne sais pas vraiment pourquoi mais ce texte me scotch, m'attrape comme un aimant. Encore et toujours l'amour qui laisse les remords et la nostalgie. Je crois que c'est le sentiment le plus terrifiant puisque le plus mystérieux. Tout ou presque en est mêlé. La peur, l'ennui, la nostalgie, la tristesse, le bonheur, la haine, la passion, la confiance, la malhonnêteté, tout peut découler de l'amour. Maladie universelle.

« Plus tu es incapable émotionnellement de donner, plus tu commences à avoir envie de l’autre »
Marissa Cooper, Newport Beach.
Et si malheureusement, une pur série de divertissement n'avait pas complètement tord?

Un autre livre que j'ai apprécié énormément, c'est l'attrape-coeur de JD Salinger.